Eric Shorjian
Le groupe HTM vient de rompre aujourd'hui le relatif silence dans lequel il était plongé depuis l'annonce de l'accord de cession signé le 18 décembre 2010. Et pour l'occasion, c'est le Comité de Direction au grand complet autour de Francis Cordelette, Directeur Général qui était réuni dans les salons d'un hôtel parisien pour répondre aux questions de la presse. Rappelons que l'accord de cession était soumis à la décision de l'Autorité de la Concurrence. Celle-ci à émis un avis positif, à condition que Boulanger s'engage à se séparer de 6 magasins (5 Saturn et 1 Boulanger) comme nous l'avons déjà indiqué le 13 juin dernier .
Comment va se réaliser la fusion des deux réseaux ?
Auparavant les actifs Saturn était constitués d'une holding et de 17 filiales. Désormais, tous les magasins qui étaient auparavant sous enseigne Saturn vont être regroupés dans une société commune du nom de Cap Boulanger. Et c'est seulement quand la société Cap Boulanger sera à l'équilibre, qu'elle sera fusionnée avec la société Boulanger. Selon Françis Cordelette, Directeur Général de HTM le retour à l'équilibre de Cap Boulanger est programmé pour 2014.
Comment est financée l'opération ?
Réalisée par HTM Group, l'opération est financée sur ses fonds propres et en partenariat avec les banques actuelles du groupe. Cela couvrira notamment le BFR de Cap Boulanger et les investissements pour passer les magasins aux normes. En 2010, HTM Group a réalisé un CA de 1,785 M°€ en croissance de + 12%. Sa part de marché est aujourd'hui de 7,8%.
Quel est son coût ?
HTM Group n'a pas dévoilé le montant des pertes qu'avait enregistré Saturn en France, ni le montant de la transaction.
Quand les 35 nouveaux magasins vont-ils prendre l'enseigne Boulanger ?
Ces magasins vont basculer progressivement sous l'identité de Boulanger de juillet à novembre 2011. La première ré-ouverture se déroulera fin juillet à Poitiers. Plusieurs magasins de Cap Boulanger feront également l'objet d'un remodeling complet dès cette année à Eragny, La Valentine, Dijon, Poitiers, Rennes et Lievin. Coût du remodeling pour les 6 magasins : 2 M°€.
Qu'advient-il des sites qui ne peuvent pas être repris ?
« Avec l'Autorité de la Concurrence, nous avons procédé à un travail long et minutieux sur les zones de chalandises » explique Bruno Pouilleaux. Boulanger doit donc sortir de sept sites. L'entreprise doit céder les fonds de commerces aux concurrents ». La cession de ces sites devra se faire via l'intermédiaire d'un mandataire. Les équipes de ces magasins (entre 50 à 60 personnes par magasin) devront être cédées avec les fonds de commerces, les repreneurs devant s'engager à reprendre la totalité des effectifs. Ces opérations devront se réaliser dans un délais de 6 mois.
Quid de l'informatique, de la logistique et du SAV ?
« Tous les interfaces d'échanges d'informations ont été réalisés, indique Jacques Honoré. Le siège d'Evry est connecté. Pour la logistique, ce sera plus rapide à partir de nos deux entrepôts-miroirs. L'ensemble des magasins seront approvisionnés par cette logistique au plus tard fin septembre. En ce qui concerne le SAV, tous les clients peuvent déjà contacter notre centre téléphonique ou passer par les magasins.
Comment va se dérouler l'intégration des 2 000 nouveaux salariés ?
«Nous allons à la fois organiser des rencontres collectives et individuelles, explique Hervé Pivet, Directeur des Ressources Humaines de HTM. Dans les magasins, le management va présenter HTM, Boulanger et les équipes de direction. Puis se dérouleront des « Entretiens de Découverte ». Chaque magasin aura également un parrain dont le rôle sera d'être un « facilitateur » durant la période de migration ». Les nouveaux collaborateurs auront également accès à la Formation, que ce soit au travers des salons interne à Boulanger (Electroménager à la rentrée, Multimédia en Octobre 2011) ou des ses modules de e-learning (une centaine à de jour environ).
Que va devenir le plus grand magasin d'électrodomestique situé à Domus ?
La surface va être conservée. Pas question de supprimer le magasin d'un niveau par exemple. L'idée serait d'y développer de nouvelles activités plutôt que d'élargir les gammes. Une étude sur le sujet à été confiée à la société spécialisée Dia-Mart.
Quel visage pour le nouveau Boulanger ?
Boulanger détient à ce jour 97 magasins. L'entreprise qui emploie 6 000 personnes détient également 5 centres de réparation et deux entrepôts (un chiffre qui passera à 3 avec l'ouverture prévu à côté d'Angers en mars 2012 sur 6 000 m2). En 2010, Boulanger a réalisé un CA de 1,368 M°€, en croissance de + 10,5%. Sa part de marché est aujourd'hui de 6,3%. Le site Boulanger.fr représente actuellement 5% du CA de Boulanger.
L'addition des réseaux Boulanger et Cap Boulanger représente 130 magasins pour un CA de 2 milliards d'euros. Cette acquisition fait remonter les objectifs de développement de l'enseigne à la hausse. Boulanger envisage dorénavant disposer, à terme, d'un parc de 180 magasins.
Pourquoi Saturn n'a pas fonctionné en France ?
Depuis l'annonce du retrait de Saturn en décembre 2010, Neomag avait évoqué à plusieurs reprise les raisons qui pouvaient expliquer cette décision. Des raisons que précise aujourd'hui HTM Group. « Réalisant un CA de 20 milliards d'euros, Media Saturn dispose d'un modèle gagnant qui fonctionne dans bon nombre de pays, explique Bernard Layous. Le concept est basé sur des magasins ayant un CA supérieur à 40 M°€, disposant d'une offre large (surtout dans des rayons tels que CD, DVD, accessoires) et sur la création de trafic grâce à des opérations publicitaires impactantes. Mais en France le groupe s'est heurté durant vingt ans à une concurrence bien établie. Il n'a pas pu dégager le chiffres d'affaires au point de vente suffisant pour dégager de la rentabilité. De plus, le consommateur est aujourd'hui multi-canal. Or Saturn n'avait pas de site Internet. D'autres raisons ont également joué : leur organisation décentralisée, le peu de présence sur le service, une couverture hexagonale insuffisante pour des campagnes de publicité nationales et une puissance relative en terme d'achats.
Pourquoi avoir acheté Saturn ?
Boulanger avait jusque là un plan de développement basé sur une moyenne de 6 ouvertures par an. Avec cette intégration d'une trentaine de nouveaux magasins (déduction faite des magasins à céder), l'enseigne Boulanger gagne cinq ans sur son plan.
Par ailleurs, Saturn n'avait pas d'entrepôts et pas de centres de services qui auraient pu faire doublon. Ses services centraux étaient limités et surtout l'enseigne disposait de grandes surfaces de ventes, proches du meilleur modèle Boulanger. En résumé, c'était la meilleure cible possible sur le marché pour gagner plus rapidement en taille. « Face à des constructeurs mondiaux, Boulanger devait accroître sa taille pour acheter mieux, déclare Françis Cordelette. Avec l'intégration des magasins Saturn, nous allons changer de catégorie ».
Marché de l'électrodomestique
Françis Cordelette résume les tendances clés
« En 20 ans, le marché français de l'électrodomestique n' a cessé de progressé chaque année en valeur et en volume sauf en 2009 et sur le premier quadrimestre de cette année 2011 ou il a enregistré un recul de - 1,2%. Le marché pèse aujourd'hui environ 22 milliards d'euros. C'est un marché éclaté. Les Grands Spécialistes détiennent 38% du marché (en incluant les ventes de leur sites de e-commerce), les Hypermarchés sont à 26%, la Vente à Distance (avec les ventes des pure-players) est à 10%, les Traditionnels sont à 13% et la catégorie des Autres (sur-spécialistes Cuisine, Home Cinema, Antennistes...) est à 12%. Depuis le début de l'année 2011, les circuits de distribution qui progressent sont ceux des GSS et du e-commerce. Dans le même temps, les hypermarchés et les traditionnels sont en recul. Ce marché est également marqué par la présence de fournisseurs mondiaux incontournables et de produits déflationnistes qui enregistrent des baisses de prix allant jusqu'à 15% voire 20% par an. Les produits électrodomestiques sont des produits importants dans la vie des consommateurs, ils comptent pour eux. Et aujourd'hui sur ce marché, ils sont devenus de véritables « acheteurs industriels ». Plus de 60% d'entre-eux se renseignent sur Internet avant leur achat. Autre grande mutation du métier : le SAV. La transition des technologies analogiques aux technologies numériques a fait baisser le nombre de pannes. Combiné à la baisse continue des prix des produits, ce phénomène amplifie la pratique de l'échange plutôt que la réparation.
