Entre nécessité de préserver la planète, choc du confinement et loi AGEC, ces dernières années, on a assisté à une véritable prise de conscience environnementale, accompagnée d’évolutions des modes de consommation. Celles-ci se sont exprimées de diverses manières : essor des achats en seconde main et de la réparation, attrait pour les équipements éco-conçus, priorité donnée à l’achat de produits plus réparables et si possible plus durables…
Consommation responsable : les Français seraient-ils en train de se désengager ?
Ces dernières années, diverses études tendaient à montrer que consommer de manière vertueuse occupait de plus en plus de poids dans les critères d’achat des consommateurs. Mais selon des enquêtes récentes, il semble que cette tendance s’essouffle et que les Français, déçus et lassés, soient, peut-être, en passe de se désengager. Alors pourquoi ce désengagement alors qu'ils sont bel et bien conscients des enjeux environnementaux et que les incidents liés au changement climatique se multiplient ?

Des consommateurs lassés, qui se sentent moins concernés, même les plus convaincus
Alors que ces dernières années, les consommateurs français s’étaient révélés de plus en plus préoccupés par une consommation vertueuse, ils semblent s’être lassés. C’est ce que montre l’édition 2025 du Baromètre GreenFlex-Ademe de la consommation responsable (édité en juin). Cette étude réalisée depuis 2004 permet justement de suivre l’évolution des mentalités. La dernière publication met en lumière une contradiction : alors que l’urgence climatique se fait toujours sentir, 53% des Français se disant inquiets pour l’avenir de la planète et estimant qu’il est urgent d’agir (un chiffre stable), ils se détournent de modes de consommation vertueux par lesquels ils étaient pourtant convaincus. Les répondants sont toujours aussi nombreux à se déclarer concernés par une consommation responsable (60%) mais seulement 13% à faire tout leur possible pour réduire leur impact environnemental à travers leurs choix de consommation. C’est peu. Et surtout, ce chiffre est en baisse de 5 points.
Des préoccupations environnementales qui passent en arrière-plan
Pourquoi ce désengagement dans une période où les consommateurs sont bien conscients des enjeux et alors même que les incidents liés au changement climatique se multiplient ? D’abord, si l’environnement fait toujours partie des préoccupations des Français, d’autres ont pris le pas, en particulier la sécurité.
L’étude conclut en outre que même les Français les plus engagés s’impatientent et baissent les bras face à un manque d’options concrètes pour mieux consommer, ou constatant que ces options ne sont pas à la hauteur de leurs attentes. Que ce soit chez les consommateurs mobilisés par ces sujets ou ceux qui se sentent moins impliqués, le principal frein à une consommation responsable est le prix. Une majorité d’entre eux ont le sentiment que consommer de manière vertueuse coûte trop cher (on constate en outre que cette impression est encore plus répandue au sein des populations mobilisées). Parmi les freins, arrivent aussi en bonne position la démotivation face à l’absence d’efforts des autres citoyens, l’étendue de l’offre jugée insuffisante ou encore - en lien avec l’impression que consommer responsable coûte - le refus de renoncer à d’autres plaisirs.
Le récent Baromètre du pouvoir d’achat des Français de Cofidis confirme de la même manière ces changements dans les sujets de préoccupation des consommateurs : l’insécurité gagne du terrain et « l’environnement poursuit sa chute dans les priorités citoyennes : passé en tête des préoccupations fin 2019 (38%), il n’est plus cité que par 17% des Français en 2025, tombant à la cinquième position » peut-on lire dans le communiqué de presse. D’après la même enquête, si une majorité de consommateurs (62%, en recul de 3 points) considèrent encore la consommation responsable comme un moyen de faire des économies, ce chiffre est en baisse (de 13 points depuis 2023).
Un sentiment de déception qui démobilise
Finalement, si l’offre peine à convaincre les consommateurs les moins sensibles aux questions environnementales, elle déçoit les plus engagés. À la lecture de l’étude GreenFlex-Ademe, ce qui nous semble ressortir le plus clairement est un sentiment de déception face à une offre trop chère, insuffisante, pas assez visible chez les commerçants et surtout pas à la hauteur des attentes. Voilà qui doit questionner les fabricants et distributeurs engagés sur ces voies. Autre signe de baisse d’engagement à considérer : les répondants cherchent moins à convaincre leurs proches de l’importance d’une consommation vertueuse. Or, c’est le cas pour la population générale mais aussi pour les plus mobilisés.
Malgré les contraintes financières, les consommateurs privilégient le neuf
Une autre enquête, cette fois réalisée par le Collectif des Solutions Circulaires avec Viavoice (« On passe la seconde », publiée en juin), met en lumière l’attitude ambivalente des consommateurs Français dans leurs habitudes d’achat. D’un côté, ils se sentent contraints financièrement (62% d’entre eux le déclarent) et cherchent à acheter moins cher. Mais de l’autre, ils ont plutôt tendance à privilégier le neuf soldé à la seconde main. C’est particulièrement vrai pour le gros électroménager et aussi le petit électroménager, qui arrivent respectivement en seconde position puis en quatrième position des biens que les Français préfèrent acheter neufs soldés que d’occasion.
Enfin, cette étude confirme des freins déjà identifiés à ce type d’achats, qui concernent principalement l’état des appareils et leur qualité, ainsi que l’absence de garantie ou de SAV. L’impossibilité de renvoyer ou échanger un produit qui ne conviendrait pas arrive en troisième position desdits freins. En revanche, le Collectif voit des signes encourageants dans les projections d’achat puisque 7 Français sur 10 envisagent d’acheter plus d’objets de seconde main dans les cinq prochaines années. Les principaux leviers sont budgétaires : 51% de consommateurs voient dans la seconde main l’occasion de faire des bonnes affaires et 36% citent la possibilité de s’offrir des produits de qualité pour un prix plus accessible.