le 22 décembre 2025
, par Rédaction Neomaghttps://www.linkedin.com/company/neomag/
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La Banque de France vient de publier ses dernières projections macroéconomiques pour l'économie française à horizon 2028. La croissance du PIB a été un peu révisée à la hausse pour 2025 et 2026 par rapport au dernier exercice de prévision, en lien avec les surprises favorables sur l'activité au second semestre 2025. L'activité progresserait ainsi de 1% en 2026 après 0,9% en 2025. La croissance du PIB serait notamment portée en 2026 par la consommation des ménages. L'inflation resterait inférieure à la cible fixée par la BCE, soit 2% par an, en 2026 et 2027, avant de revenir proche de cet objectif en 2028. Les aléas autour de la projection de croissance sont globalement équilibrés. Les surprises favorables récentes sur l'activité pourraient constituer les premiers signes d'un rebond de la demande privée plus rapide. À l'inverse, un maintien de l'instabilité politique et budgétaire continuerait de peser sur la consommation des ménages et l'investissement des entreprises.
Pas de véritable moteur interne puissant
Grâce à un troisième trimestre 2025 plus dynamique qu’anticipé (+0,5 %), porté par les exportations (notamment aéronautiques) et par l’investissement des entreprises, la croissance française devrait donc atteindre 0,9 % en 2025, contre 0,8 % prévu initialement. Pour autant, la trajectoire pour les 24 mois à venir restera sage estime la Banque de France : + 1,0 % en 2026 et 2027, puis + 1,1 % en 2028. Autrement dit, la France avance mais sans véritable moteur interne puissant. Et la Banque de France le souligne clairement : moins de rigueur budgétaire ne créerait pas plus de croissance, car l’incertitude fiscale prolongée pousse les ménages et les entreprises à temporiser.
Inflation : le calme avant la possible remontée
Bonne nouvelle pour les consommateurs : l’inflation reste sous contrôle. Après 2,3 % en 2024, elle tomberait à 0,9 % en 2025, un niveau historiquement bas, largement lié à la baisse des prix de l’énergie. Mais elle risque de remonter progressivement : + 1,3 % en 2026 et 2027, + 1,8 % en 2028, selon la Banque de France. Le pays continuerait tout de même d'afficher une inflation inférieure à celle de la zone euro, notamment grâce à une dynamique salariale plus modérée.
La consommation des ménages soutiendrait la reprise
En 2025, le pouvoir d’achat des ménages continuerait de croître mais plus modérément (0,7 %), malgré la baisse de l’inflation, après la hausse exceptionnelle de 2024 (2,5 %) liée aux prestations sociales (retraites) et aux revenus de la propriété (taux d’intérêt). Il ralentirait encore en 2026, sous l’effet de la remontée de l’inflation, avant de progresser plus fermement en 2027 et 2028. Les hypothèses budgétaires intégraient toutefois certaines mesures initialement prévues dans le PLFSS, en particulier le gel des prestations et retraites, qui ne figurent plus dans la version de la loi votée le 9 décembre. De ce fait, le pouvoir d’achat devrait augmenter davantage en 2026. Pour autant, si l’incertitude budgétaire perdurait, cela se traduirait non pas par un surcroît de consommation mais par une moindre diminution du taux d’épargne.
Le pouvoir d’achat de la masse salariale du secteur marchand progresserait quant à lui de manière continue sur l’horizon de prévision (cf. graphique 9). En 2025, il augmenterait de 0,7 %, porté par la hausse du salaire réel par tête qui compenserait le repli de l’emploi. La hausse du salaire moyen par tête réel resterait significative en 2026 et 2027 et la reprise de l’emploi se ferait sentir à partir de 2027. Le pouvoir d’achat de la masse salariale marchande augmenterait ainsi de 0,7 % en 2026, 1,2 % en 2027 puis 1,0 % en 2028.
Dans les comptes nationaux publiés le 28 novembre, la consommation des ménages au troisième trimestre 2025 a progressé de + 0,1 %, un rythme légèrement inférieur à nos projections de septembre. Après une croissance en moyenne annuelle de 1,0 % en 2024, elle ralentirait à 0,4 % en 2025. Elle retrouverait ensuite un peu de dynamisme à moyen terme, avec une croissance de 0,8 % en 2026, 1,0 % en 2027, puis 1,3 % en 2028. Cette amélioration serait permise par les gains de pouvoir d’achat de la masse salariale, sous l’hypothèse que la confiance des ménages se redresse.
Les investissement des ménages devraient se redresser
Après une forte contraction en 2024 (- 5,6 %), l’investissement des ménages a reculé encore légèrement au troisième trimestre 2025 (- 0,1 %), pénalisé par sa composante sous forme de services liés aux moindres transactions immobilières. Toutefois, plusieurs indicateurs suggèrent un redressement à venir, estime la Banque de France.
D’abord, le pouvoir d'achat immobilier des ménages s’est légèrement redressé, porté par la détente observée du coût du crédit et la correction puis la stabilité des prix immobiliers dans l’ancien depuis début 2024. Par ailleurs, la production de nouveaux crédits aux ménages, repartie en 2024, poursuit sa progression en 2025, signalant une reprise des transactions dans l’ancien et dans les services liés à l’immobilier. Les mises en chantier montrent également des signes de reprise, ce qui alimenterait la dynamique de l’investissement dans la construction au cours des prochains trimestres. Dans ce contexte, l’investissement des ménages devrait se redresser au quatrième trimestre, conduisant à une croissance légèrement positive sur l’année 2025, avant un rebond graduel en 2026 et 2027.
Entreprises : investissement à deux vitesses
Côté entreprises, le diagnostic est nuancé. L’investissement repart, mais de manière très sectorielle. Il y a une forte dynamique dans les services numériques, l’IT et l’information-communication. Mais dans le même temps, la Banque de France constate le recul persistant dans la construction et certains biens industriels. En clair, l’incertitude budgétaire incite à reporter les projets lourds, tandis que les investissements immatériels, plus flexibles, résistent mieux. À moyen terme, la transition énergétique, la numérisation et la défense pourraient toutefois servir de leviers structurels pour l'économie hexagonale.
Le taux de marge serait stable en 2026 et 2027
Selon les comptes nationaux publiés le 28 novembre, le taux de marge des sociétés non financières s’établit à 31,5 % au troisième trimestre 2025, soit un niveau légèrement supérieur à sa moyenne de 2019 (cf. graphique 12). En prévision, le taux de marge serait stable en 2026 et 2027, bénéficiant d’un côté des baisses des impôts de production (CVAE, cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises) prévues dans le PLF initial pour 2026, mais pénalisé de l’autre par les hausses de cotisations employeurs prévues dans la LFSS (reprofilage des allègements généraux et réduction de certaines niches sociales applicables aux compléments salariaux) votée le 9 décembre. La hausse du taux de marge en 2028 serait due à un décalage comptable lié à la mise en œuvre du second marché du carbone européen (SEQE-UE 2). Le taux d’autofinancement serait également stable, indiquant la capacité des entreprises à financer leurs investissements par des ressources internes.
Emploi : le marché du travail plie, sans rompre
L’emploi public soutient encore l’activité, mais les créations d’emplois marchands restent limitées, notamment avec la réduction des aides à l’apprentissage. Le message est clair : le marché du travail tient, mais il n’est plus un moteur de croissance. Le taux de chômage remonterait légèrement à 7,8 % en 2026, avant de refluer à 7,4 % en 2028.
Finances publiques : le vrai point de tension
C’est sans doute là que le bât blesse le plus. Malgré une réduction du déficit à –5,4 % du PIB en 2025, l’effort reste insuffisant pour stabiliser la dette, qui dépasserait 120 % du PIB en 2028, creusant l’écart avec la zone euro. Et surtout, la Banque de France insiste : une dérive budgétaire n’apporterait pas de gain de croissance, mais nourrirait encore davantage l’attentisme économique.
L’incertitude fiscale comme frein commercial
En conclusion, on peut dire que si l’économie française montre une résilience indéniable, portée par ses exportations, ses services et une inflation maîtrisée, elle reste suspendue à une variable clé : la confiance. Et avec une absence de visibilité fiscale et budgétaire qui entretient l’attentisme, ni les ménages ni les entreprises ne lâcheront vraiment les chevaux l’année prochaine. Pour les distributeurs comme pour les marques, l'avertissement est stratégique. Cela signifie que la prochaine bataille ne se gagnera pas uniquement sur le prix bas, mais avec un pilotage fin de la demande des consommateurs et de leur confiance.