Par Philippe Michel
Rarement la présentation d’un plan de « transformation » comme l’appelle Carrefour aura suscité autant de Unes, articles et débats. Il faut dire que l’on parle ici du leader français de la distribution alimentaire, dirigé aujourd’hui par le plus médiatique des patrons, Alexandre Bompard. Un homme habitué aux stratégies de redressement comme il l’a auparavant prouvé en créant Fnac Darty.
Nous ne commenterons pas ici les suppressions d’emploi, ni ne disserterons sur la fin des hypermarchés pas plus que nous n’émettrons d’avis sur l’avenir du potiron bio au rayon fruit et légumes... Bien d’autres médias l’ont fait et avec plus de légitimité sur le sujet. On pourra cependant retenir deux termes importants du plan Carrefour 2022, marquant des tendances fortes et qui s’appliquent aussi à la distribution des biens techniques : digitalisation et proximité. Tout comme une politique d'ouverture sur certains segments...
Des espaces Fnac Darty dans les Carrefour ?
Dans son plan de transformation, Alexandre Bompard a largement évoqué l’adaptation et l’optimisation de la surface de vente. « Les hypermarchés en France verront ainsi leur surface réduite lorsque cela est nécessaire, pour un total d’au moins 100 000 m² à horizon 2020 » précise le groupe qui déclare aussi « chercher des alliances à l’achat et à la vente pour améliorer l’offre non-alimentaire lorsqu’elle n’est pas pertinente ». Et en l’occurrence, il faut pour savoir si l’électroménager et l’EGP sont pertinents ou pas, écouter Alexandre Bompard : « … le non-alimentaire est à mes yeux une source de valeur significative, mais hétérogène. Sur de nombreuses catégories permanentes, Carrefour reste tout à fait légitime : cuisiner et recevoir, la puériculture, par exemple. L’hypermarché est aussi très performant pour la saisonnalité en magasin : période de Noël, rentrée des classes. Ces rayons seront conservés et renforcés.
En revanche, dans certains pays et sur certaines catégories, nous ne sommes plus compétitifs. Sur celles-ci, nous devons nous associer avec des partenaires à l’achat comme avec Fnac Darty ou à la vente avec des marques qui opéreront en propre dans nos espaces. » Et dans cette phrase, la ponctuation a toute son importance. On pourrait comprendre en effet que l’exemple de Fnac Darty n’est pris que pour l’achat, ce qui a déjà été fait il y a quelques semaines. Et "le ou à la vente" qui ne concernerait pas Fnac Darty.
Il faut alors lire l'entretien accordé à nos confrères du Parisien où Alexandre Bompard choisit d'autres mots : "cela nous a conduits à conclure un partenariat avec Fnac-Darty et à prendre une participation dans Showroomprivé. Des partenaires spécialisés seront invités à gérer leurs propres espaces dans nos hypers si leur offre est plus attractive." Là encore, le lien n'est pas évident mais se précise.
D'autant plus que dans le plan Carrefour 2022, rueducommerce est invité à reprendre son "indépendance commerciale" et à trouver sa place sur la marketplace de carrefour.fr. Cela signifierait que Carrefour ne compte pas faire avec rueducommerce ce que Casino a fait avec cdiscount, c'est à dire lui accorder des espaces dans les hypermarchés. Mais sous quelle forme ? Fnac et Darty, Darty ou Fnac ? Sur quels quartiles de prix, et à quel coût pour Fnac Darty ? Ces questions trouveront leur réponse sans aucun doute d'ici 2022, et peut-être même dans les prochains mois...