Par Sandra Nicoletti
Neomag : Depuis le succès du D90 de Nikon lancé en 2008, plusieurs constructeurs proposent désormais des fonctions d’enregistrement vidéo en Haute Définition sur leurs appareils photo. En tant que spécialiste de la photo depuis 1978, comment appréhendez-vous ce virage technologique ?
Richard Studient : Avec beaucoup d’enthousiasme ! Loin d’être un gadget, cette nouvelle fonction d’enregistrement en Haute Définition atteint des qualités exceptionnelles, qu’à l’inverse, aucun caméscope n’a jamais réussi à délivrer en mode photo. Il s’agit là d’une vraie révolution technologique, au même titre que nous l’avons vécu lors du passage de l’argentique au numérique. Je suis totalement convaincu par le succès de cette fonctionnalité supplémentaire apportée au consommateur. Elle répond à de réelles attentes en termes d’usage et de qualité et les modèles présentés aujourd’hui répondent parfaitement à ces critères. Pour un prix équivalent à celui d’un caméscope, le consommateur peut aujourd’hui acquérir un appareil photo moyen/haut de gamme qui sait tout faire, et avec une très bonne qualité. J’ai d’ailleurs décidé d’arrêter la commercialisation de caméscopes dès le 1er janvier prochain pour me concentrer sur mon cœur de métier que sont les appareils photos, en accordant bien évidemment une place particulière à ce nouveau segment de produits avec vidéo HD.
Neomag : Est-ce là une opportunité de reprendre des parts de marché sur la concurrence, et notamment par rapport à la vente en ligne ?
Richard Studient : Sans aucun doute. Ces nouvelles fonctionnalités impliquent un véritable discours autour du produit et de ses valeurs d’usage auprès du consommateur, qu’aucun site internet n’est capable de fournir. Rien ne vaut le discours magasin pour guider le consommateur dans son choix et le conduire à sélectionner un produit de qualité qui lui garantira une grande satisfaction. C’est pour nous une réelle opportunité de se recentrer sur les fondamentaux de notre métier, à savoir le conseil et le choix en magasin.
Neomag : Justement, au niveau des magasins, comment positionnez-vous les produits photo/vidéo dans les linéaires ? Et est-ce que cela implique des traitements particuliers au niveau du merchandising, de la formation, etc ?
Richard Studient : Pour ne prendre qu’un exemple mais qui reste certainement le plus parlant, le GF1 de Panasonic est un produit hybride à la croisée des chemins entre le boîtier à objectif interchangeable, un Compact et un caméscope. Un appareil qui délivre d’excellentes performances dans ces trois principales fonctions et qui est donc positionné dans nos linéaires dans trois rayons : boîtiers Reflex, Compacts, et Caméscopes. En matière de formation, nous sommes actuellement en cours de discussion avec les marques afin de pouvoir organiser une formation multi-marques dispensée par nos équipes et non par les constructeurs. L’objectif est d’informer au mieux le vendeur pour qu’il soit capable de répondre aux différentes interrogations du consommateur, en ayant toutes les cartes en main pour le faire. Expliquer ce qui est bien et pourquoi ça l’est, émettre des critiques constructives sur des appareils, voilà ce qui doit être délivré au vendeur. Les constructeurs ne doivent pas avoir peur d’être comparés, au contraire, chacun à ses propres atouts et notre objectif final est de guider au mieux le consommateur en fonction de ses propres besoins.
Neomag : Comment voyez-vous évoluer votre métier et le marché de la photo en général ?
Richard Studient : Je suis par nature quelqu’un de très confiant et je reste convaincu que les spécialistes photo ont encore de très belles années à vivre, pourvu qu’ils restent attentifs aux évolutions du marché. Malheureusement, le monde de la photo a tendance à porter des œillères et les mentalités ont besoin d’évoluer encore aujourd’hui. Seuls ceux qui oseront prendre les virages technologiques s’en sortiront demain. Les constructeurs ne manquent pas d’idée pour relancer sans cesse le marché et les consommateurs y sont sensibles. La photo demeure un marché de loisirs, mais elle s’empare peu à peu de notre quotidien pour ne plus le quitter.