Par Elisabeth Bartharès
Le PEM compte un certain nombre de ces success stories sur le mode de l’étoile filante. Qui n’a pas en mémoire la machine à pain, quasiment produit de l’année 2008, plébiscitée par les Français pour retomber presque aussitôt? On aurait pu craindre ce type de trajectoire pour l’aspirateur robot, marché né en 2009, avec des croissances flirtant avec les 50% les deux premières années. Mais le succès se confirme. Si la croissance actuelle est moins spectaculaire, elle reste insolente au regard de nombreuses familles de produits avec +21% en volume en 2012 (soit 190.278 pièces vs 2011 157.504 pièces) et +11% en valeur (57 millions € de Chiffres d’affaires vs 2011 51 millions €). En 2013 les prévisions lui font passer allègrement la barre des 200 000 pièces. A noter que la France est le marché européen qui performe le plus.
Raison de cette bonne santé durable ? Au delà de la tendance de fond : la corvée ménagère réduite au maximum, au delà de l’aspect un brin « geek » du début, tous les défauts de jeunesse ont été corrigés ou presque, grâce à une optimisation technologique considérable. L’aspirateur robot bénéficie de la confiance de plus en plus de consommateurs.
Robot avant d être électroménager
Et pourtant, il ne figure toujours pas au catalogue de la plupart des acteurs de l’entretien des sols. Le fait est que rares sont les grands du PEM à avoir réellement misé sur le segment. Insatisfaction sur la performance technologique, doutes sur l’efficacité ? Volonté de ne pas cannibaliser les autres produits d’un marché poids lourd du secteur ? Rowenta, Miele, Philips, Electrolux ( ce dernier pourtant pionnier sur le produit) en sont absents aujourd’hui ou n’investissent pas réellement le segment. BSH avait ainsi confié à Neomag au dernier IFA, que le groupe ne se lancerait que si le marché acquerrait visibilité et maturité. Quant à Dyson, l’entreprise britannique semble considérer qu’elle n’a pas de réelle valeur ajoutée technique à y apporter. Dans les groupes historiques d’électroménager, seul Hoover semble y croire.
De fait, cet attentisme fait la part belle aux grands groupes asiatiques champions de l’électronique ou encore aux spécialistes de la robotique. Aujourd’hui, le marché est détenu par Robopolis, le premier à l’avoir investi de manière durable, avec la gamme Roomba (13 références, environ la moitié des ventes -photo ci-contre) puis LG et Samsung qui représentent respectivement 20 et 15% du marché avec les gammes Hombot et Navibot, positionnées premium.
Hoover est 4ème, avec la gamme Robot.com ( 4 références). Dernier à s’y distinguer, la jeune société E-zicom (photo de une), start up française de la robotique de service, qui se positionne sur un rapport qualité- prix plus accessible avec la gamme E-ziclean (6 modèles.)
Un produit technique créateur de valeur
En termes de distribution, l’aspirateur robot reste un chouchou des distributeurs spécialisés. Produit à haute valeur ajoutée, pouvant décontenancer potentiellement de nombreux consommateurs, sa vente ne se passe pas d’explication et de conseil. Les grands spécialistes se taillent ainsi la part du lion, devant les réseaux longs et internet, de loin suivis par la grande distribution alimentaire.
A noter une forte saisonnalité des ventes : en 2012 , le mois de décembre est le plus fort de l’année, pour la 3ème année consécutive. Aspirateur robot, achat cadeau ? Un achat avec une dimension ludique et une forte connotation plaisir en tous cas. Autre spécificité qui le distingue du « commun » des aspirateurs.
La période récente a vu la démocratisation de l’aspirateur robot (et l’entrée de nouveaux acteurs à bas prix). Le prix moyen a baissé de façon importante entre 2011 et 2012 : de 323 à 300€. Il subsiste cependant de forts écarts selon les marques et les caractéristiques techniques de l’appareil, la fourchette s’étalant d’une centaine d’euros jusqu’ à environ 800 € pour les modèles les plus hauts de gamme. Malgré cette baisse, l’aspirateur robot est donc incontestablement un générateur de valeur sur la famille, le prix moyen d’un aspirateur toutes catégories confondues étant de 112 €.
Du gadget à la maturité technologique
Pas de hasard si les grands groupes d’électronique performent. Nombre de caractéristiques du produit tiennent plus du domaine du logiciel que de la maîtrise de la technologie de l’aspiration- dépression. Et le pari se révèle gagnant, si l’on en croit les blogs et les forums consommateurs : l’aspirateur robot tient aujourd’hui ses promesses, les consommateurs le trouvent efficace. Perdant son aspect gadget des débuts, il a su évoluer techniquement pour accomplir un nettoyage haut de gamme des surfaces et pallier ses carences : autonomie limitée, problème de reconnaissance des obstacles, évaluation du degré de saleté. En un mot, il a gagné en intelligence.
L’aspirateur robot est aujourd’hui incontestablement très High Tech, proposant comme de nombreux produits de cet univers plus qu’une fonction mais une « expérience »à part entière. Variété des programmes , optimisation de la navigation, capteurs capables de détecter l’intensité de la poussière et d’adapter son action, fonction antichocs et antichute, murs virtuels, meilleur guidage du consommateur dans ses premières utilisations, … un faisceau d’efforts qui visent a la fois l’efficacité, l’ergonomie et le design et se matérialisent par plusieurs innovations fortes sur le marché en 2012.
Chez LG, le lancement du Hom-Bot Square signe la volonté du coréen d’investir ce marché avec des produits premium. Intégrant la fonction « détection des angles » et la technologie double caméra, il a été lancé à la fin de l’année dernière avec un design carré inédit avec une promesse de nettoyage beaucoup plus efficace que les robots dits « conventionnels ».
Chez Samsung dont la gamme Navibot se décline en 4 appareils, l’attention est portée sur l’intelligence de la navigation et à l’ergonomie : à noter l’intégration à la station de recharge du dernier né de la gamme d’un dispositif de vidange automatique de la poussière.
Hoover a équipé ses deux nouveaux modèles, lancés en octobre dernier, d’une technologie leur permettant de réguler automatiquement le débit d’aspiration grâce à des capteurs intelligents qui détectent la quantité de poussière ; mentionnons aussi un mode démo qui simplifie considérablement l’appropriation de l’appareil, partant du constat que 30% des retours SAV sur le marché concernent des nouveaux utilisateurs ayant des difficulté de prise en main de l’objet.
Il reste que l’aspirateur robot n’a pas la prétention de devenir un équipement principal mais d’appoint, n’est pas totalement tout terrain et n’est pas adapté aux environnements très sales. C’est plus l’allié d’un ménage quotidien pour une maison toujours propre sans effort . Cette mission, déjà honorable, peut être considérée comme accomplie de façon satisfaisante après 3 ans d’activité. Et au-delà, le succès pérenne de ce marché prouve que les consommateurs sont prêts à faire rentrer les robots dans leur quotidien. La robotique de service ne fait que commencer.