Nous avons investi, relocalisé, internalisé la fabrication de produits qui étaient sourcés

Vincent Rotger -
Président de Haier France

Nous avons investi, relocalisé, internalisé la fabrication de produits qui étaient sourcés

le 29 août 2022
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Lors d’un entretien réalisé à Milan avec Vincent Rotger, président de Haier France, nous avons évoqué la stratégie du groupe consistant à relocaliser sa production en Europe. Et la manière dont Haier persiste dans sa stratégie de développement de la connectivité, en une période où certains composants se font rares. 

Nous avons investi, relocalisé, internalisé la fabrication de produits qui étaient sourcés

Neomag. Les deux dernières années ont été exceptionnelles pour le marché de l’électroménager. Depuis le début de l’année 2022, les chiffres sont en recul. Comment le groupe Haier se positionne-t-il ?

Vincent Rotger. Nous avons la chance d’avoir des sources de croissance par l’expansion de gammes de produits comme le lancement de l’encastrable chez Haier. L’usine roumaine va pouvoir couvrir tous les segments que nous couvrions moins par le passé… Nous avons donc des sources de croissance liées à notre stratégie de développement des catégories. Cela nous permet d’envisager cette période de façon plus sereine. Le marché est en effet en recul et il est très difficile de l’analyser. Faut-il comparer cette année à 2021, à 2020, voire à 2019 ? Structurellement, par rapport à 2019, nous sommes toujours en croissance. Le marché a été déstabilisé et la comparaison des chiffres est très difficile par rapport à des années historiques qui ont été décousues (ouvertures, fermetures, produits essentiels ou non, confinements…). Je pense qu’il faut garder la tête froide et se concentrer sur les fondamentaux du marché qui sont excellents. 

2020 et 2021 ont été l’avènement du focus sur la maison. Il est compréhensible qu’on ait une chambre de décompression où les gens vont vouloir un peu plus se consacrer à leurs loisirs, mais je reste confiant sur la capacité de cette industrie à être mature. Le consommateur n’a pas oublié les deux années passées et sait à quel point son intérieur et l’environnement de sa maison est important. Je pense qu’il va continuer à investir dans des produits plus durables et que la tendance de montée en gamme va perdurer parce que les notions de durabilité et de réparabilité vont devenir de plus en plus importantes. Et cela joue en notre faveur.

 

Vous avez présenté la gamme encastrable Haier fin 2021. Où en est son déploiement ?

Nous sommes référencés chez 70% de nos clients cuisinistes, nous avons encore à convaincre 30% d’entre eux. Ce que nous comptons bien faire. Quant à la grande distribution spécialisée, nous sommes là où nous voulions être, avec en tant que marque premium un focus fort sur les GSS. Nous sommes présents chez Darty et Boulanger et avançons sur le référencement. Nous avons aussi cette force de complémentarité des gammes aujourd’hui. Nous sommes leader de la cave à vin en France (en volume), leader du multiporte grande capacité, qui est une tendance de fond et en croissance. Nous sommes également forts dans le domaine du lavage. Et maintenant, nous offrons une possibilité de compléter la gamme avec de l’encastrable. Nous proposons une largeur et une profondeur de gamme assez uniques.
En plus, nous complétons l’offre avec de vrais produits innovants. Si on regarde la rupture technologique qu’on apporte notamment sur le lave-vaisselle en termes de classe énergétique, de capacité, de brevets sur l’efficacité de lavage… Nous avons toutes les chances de convaincre encore plus nos partenaires distributeurs.

“ Nous sommes référencés chez 70% de nos clients cuisinistes, nous avons encore à convaincre 30% d’entre eux. ”

Et qu’en est-il des consommateurs ?

Nous sommes confiants aussi. Nous suivons de près les avis consommateurs sur Internet et ils sont excellents. C’est ce qui fait que la marque Haier se développe plus rapidement qu’une autre je pense, c’est cette attention portée à la qualité produit qui fait que les avis consommateur en ligne sont toujours très positifs. En moyenne en France, sur la marque Haier, nous obtenons la note de 4,5/5, ce qui est assez hors norme. Et forcément cela fait écho, le bouche à oreille fonctionne bien. Cela crée une dynamique positive à tous les niveaux, car cela rassure les consommateurs mais également les vendeurs qui peuvent s’appuyer sur la qualité produit et sur des technologies singulières.

De nombreux appareils sortent de vos usines européennes. Va-t-il y en avoir de plus en plus ?

Nous avons investi, relocalisé, internalisé la fabrication de certains produits qui étaient sourcés, notamment en réfrigération sur la marque Candy. Alors qu’on achetait quelques produits en Asie, aujourd’hui, 100% sont fabriqués par nos soins en Europe, en Roumanie, dans cette nouvelle usine dans laquelle nous avons investi 71 millions d’euros. Nous avons commencé à y produire à la fin de l’année dernière. Cette usine produit des appareils de réfrigération pour toutes nos marques. Sachant que l’usine roumaine est vraiment destinée à adresser le marché européen. Or, il est encore très orienté vers les combinés de 60 cm, même s’il évolue beaucoup vers des multiportes et des modèles de grande capacité.
Nous ne comptons pas nous arrêter là. Nous avons commencé par les combinés en 60 et 70 cm et à partir du mois d’octobre, nous lançons le même combiné en 60 mais trois portes et 2 m de haut, avec ce double tiroir qui est la signature de Haier. C’est un exemple typique d’appareil qui était produit en Asie mais qui sera fabriqué en Roumanie dès octobre. Nous avons également une usine de sèche-linge en Turquie et une usine de lave-vaisselle en Turquie.

“ Sur la plupart des produits, nous sommes capables de redéfinir de nouvelles plateformes, de nouvelles histoires, de nouvelles technologies en adéquation avec nos cibles. ”

Après le rachat de Candy-Hoover, vous avez rapidement défini le positionnement des marques. Les nouveautés que vous aviez présentées à Milan donnent le sentiment qu’il y a une mise en commun de la R&D.

En effet, définir un positionnement était indispensable. Quand on réalise la fusion, on associe trois marques voire quatre marques au niveau local avec Rosières (NDLR : Rosières est seulement distribué en France), il fallait d’abord que notre cible consommateur soit claire. Une fois que c’est un phare pour toutes les équipes R&D, cela nous permet de développer de façon adéquate les produits pour Haier, pour Rosières, pour Hoover et pour Candy.
De plus, grâce à la relocalisation industrielle, les équipes R&D travaillent aujourd’hui à partir d’une copie blanche, ce qui est formidable pour elles. Sur la plupart des produits, nous sommes capables de redéfinir de nouvelles plateformes, de nouvelles histoires, de nouvelles technologies en adéquation avec nos cibles. Cela nous rend encore plus puissants.

La marque Rosières est bien connue en France. Mais qu’en est-il ailleurs en Europe ? Est-elle connue, distribuée ?

Non c’est une marque franco-française ; c’est une volonté. Mais nous y tenons énormément. D’ailleurs, nous en ferons l’annonce officielle à l’IFA : nous venons de faire l’acquisition d’une usine de pianos de cuisson premium au nord de l’Italie. Il s’agit de l’usine Elba qui fabrique des pianos de cuisson premium. Et le premier produit qui en sortira est un piano de cuisson Rosières, qui sera disponible en septembre. J’en suis vraiment heureux parce qu’on recrée l’histoire et l’historique de Rosières en France.

Vous avez fait le pari de la connectivité depuis plusieurs années. Or, de nombreux fabricants ont du mal à s’approvisionner en composants. Mais vous semblez maintenir ce cap vers le tout connecté.

Absolument. Même si nous avons une stratégie de localisation, nous avons aussi une force, une assise globale très forte. Nous sommes présents sur tous les continents, ce qui nous permet de sourcer des semi-conducteurs partout dans le monde. Nous parvenons donc à être agiles. Les difficultés d’approvisionnement existent mais à date, nous n’avons pas eu de rupture de production et nous ne sommes pas empêchés dans notre stratégie de déploiement de la connectivité. Sachant que nous gardons notre objectif d’avoir 100% des produits connectés d’ici 2023/2024.

“ Les difficultés d’approvisionnement existent mais à date, nous n’avons pas eu de rupture de production et nous ne sommes pas empêchés dans notre stratégie de déploiement de la connectivité. ”

Concernant la connectivité et la plateforme HoN, vous évoquez des partenariats avec des start-up locales. Quels partenariats avez-vous noué en France ?

En France, il y a Vivino, Jow et Spring. Vivino est un bon exemple de partenariat européen. C’est une sorte de moteur de recherche qui apporte une valeur ajoutée pour toutes nos caves à vin vendues en Europe. Au niveau local, nous discutons avec une quinzaine de start-ups. Et nous avons d’ores et déjà deux start-ups intégrées directement dans l’application. Spring et Jow sont disponibles sur HoN depuis un peu plus de 15 jours.
Spring propose du détergent écologique livré automatiquement dans votre boîte aux lettres via un système d’abonnement. Vous avez aussi la possibilité d’utiliser Jow pour compléter l’expérience d’utilisation de nos fours par exemple, ce qui offre une valeur ajoutée incroyable, notamment grâce aux recettes proposées. Jow dispose en interne d’une équipe de créatifs cuisiniers qui développent des recettes très sympa et très proches du consommateur. Ils adoptent les tendances locales de consommation ; c’est vraiment le genre de choses qu’on recherche dans ce type de partenariat. Les recettes sont suggérées en fonction de votre profil, de vos goûts, de vos allergies alimentaires, de votre famille… Cela permet de proposer des recettes qui correspondent à l’utilisateur. Il s’agit d’un ciblage très fin que nous n’aurions pas pu internaliser et nous n’avons d’ailleurs pas cette prétention. D’où l’idée de s’appuyer sur des partenaires locaux qui feront toujours cela mieux que nous. Appuyons-nous sur les forces de chacun pour grandir ensemble, avec humilité, plutôt que d’essayer de tout internaliser sans succès. Ce programme évolue sans cesse pour enrichir l’expérience consommateur.

Vous expliquiez que le groupe s’appuyait énormément sur ses équipes locales pour prendre des décisions et adresser le marché. C’est assez rare et même atypique pour une entreprise de cette dimension, n’est-ce pas ?

En effet, chez nous, rien ne vient du haut. Évidemment, nous avons cette puissance industrielle en recherches et développement. Mais nous considérons que c’est un incubateur corporate, une sorte d’incubateur d’initiatives locales. Cette philosophie est portée de notre grand patron en Chine jusque sur le terrain. Les trois thèmes chers à Haier - l’entreprenariat, 0 distance avec le consommateur et l’écosystème donc le fait de s’appuyer sur des partenaires - figurent dans tous les bureaux. Parce que nous sommes persuadés que dans un monde très instable, si on n’est pas agile et proche du consommateur, l’entreprise va disparaître à terme. On ne peut pas imaginer qu’une stratégie globale soit efficace : le contexte est différent, le consommateur est différent… La crise sanitaire ou la crise ukrainienne actuelle le confirment, il faut être proche du consommateur.

Vous misez sur la qualité, sur la relocalisation en Europe... Pourtant, lorsque vous présentez vos produits, vous parlez beaucoup d’usage, de qualité, de technologies, mais assez peu de RSE. Pourquoi ?

Nous aurons des occasions de prendre la parole. Je pense que l’IFA en sera une. Car au contraire, nous sommes extrêmement actifs.
D’abord, 90% de l’empreinte carbone d’un appareil électroménager est lié à l’usage. Or, en France, nous avons 50% de parts de marché sur les lave-linge de classe A : un lave-linge sur deux de classe A vendu est un produit du groupe Haier. Notre R&D nous permet d’être plus efficaces et de réduire notre impact. Et au-delà de l’empreinte carbone qui est essentielle dans une stratégie RSE, il faut aussi songer au portefeuille du consommateur, surtout en période d’inflation et d’augmentation du prix de l’énergie ; c’est un élément déterminant.
Nous sommes aussi en train de regarder tout ce que la connectivité peut apporter car le nombre d’applications possibles est phénoménal. Par exemple, sur le marché de la réparation, en France, environ 50% des interventions SAV sont faites sans pièces. Nous ne le mettons pas encore en avant aujourd’hui, mais tous nos produits connectés offrent cette possibilité d’être reprogrammés à distance. Or, quand il y a une intervention sans pièce détachée, dans 90% des cas, il s’agit d’une reprogrammation du software ou juste d’un reset.

Et en ce qui concerne l’entretien, il y a déjà des alertes dans l’application non ?

Tout à fait. Et en suivant ces alertes, le consommateur est déjà guidé, voire « éduqué ». Au-delà de cela, quand il appelle le call center, on a une visibilité directe de son produit, avec une possibilité de diagnostic et de reprogrammation à distance. Et là, en matière d’empreinte carbone, en éliminant les interventions qui peuvent être évitées, il est possible de faire des économies phénoménales. C’est un des axes, mais nous en avons encore beaucoup en cours de développement. Vous en saurez plus à l’IFA.

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