Nicole Maïon
L’isolation acoustique est l’un des principaux critères de confort à la maison pour les Français. Or, une mauvaise isolation des bruits concerne 1/3 d’entre eux selon une enquête Qualitel/Ipsos. Cette problématique concerne l’isolation par rapport aux bruits issus de l’extérieur mais aussi au sein même de l’habitat. A cet égard, la réglementation en matière d’isolation du bâti s’est renforcée en 1999 mais quid de l’application de la réglementation des équipements de la maison à commencer par l’électroménager en matière d’acoustique ? Le bruit était le thème de deux conférences successives qui se sont tenues récemment au sein des locaux de la Capeb.
La première, organisée par l’Association des journalistes de la construction concernait l’acoustique en matière de bâti avec notamment l’intervention de représentants du CIDB et de Qualitel ; la seconde, organisée par l’ACAM, syndicat des journalistes de la maison, centrait la problématique du bruit généré dans la cuisine, de plus en plus ouverte au sein de la maison. Animée par Eric Shorjian, Neomag, cette table ronde réunissait un représentant du LNE, laboratoire nationale de métrologie et d’essais, et côté fabricants, des représentants de Falmec et Liebherr, mais aussi de 3M et du fabricant de fournitures, Glass.
Des essais complexes pour mesurer les émissions sonores dans leur contexte
Alors que les cuisines se font de plus en plus ouvertes, les bruits dits ponctuels car se détachant du bruit environnant de la pièce, sont principalement générés par les équipements électroménagers. La problématique est devenue un défi pour les fabricants. La réglementation impose depuis 2011 d’afficher les émissions acoustiques exprimées en décibels pour tout produit pour lesquels le bruit constitue un critère pertinent tels qu’appareils de lavage et froid à l’instar de sa consommation énergétique.
Or, Patrick Cellard, ingénieur spécialiste chez LNE a souligné le manque de contrôle des valeurs acoustiques affichées sur l’étiquetage des équipements en magasin. « Ce ne sont que des valeurs déclaratives de la part des fabricants et rares sont les contrôles réglementaires, de par le coût exigé par des tests en laboratoire ». En cause également, la complexité de ces essais pour mesurer les émissions sonores dans leur contexte. « Le bruit des appareils a certes baissé, de par l’effort entrepris par les fabricants et certains d’entre eux font appel à nos services pour vérifier leurs propres mesures mais d’un point de vue général, le déclarations en matière d’émissions acoustiques restent peu fiables » conclue Patrick Cellard.
L'importance cruciale des conditions d'installations
A la question de la fiabilité des mesures affichées, Quentin Deschamps, chef de produit chez Falmec a confirmé la complexité des normes et la nécessité de tester le produit dans la même situation afin d’obtenir des résultats pertinents. A titre d’exemple, ce dernier a souligné la difficulté de comparer différents modèles de hottes pour le consommateur final. « Le niveau sonore est toujours affiché en mode évacuation ce qui peut générer une confusion quand on parle de modèle mixte, une hotte à recyclage étant toujours plus bruyante qu’une hotte à évacuation. Reste que l’un des devoirs du fabricant est de répondre à ce souci de l’acoustique ».
Pour se faire, cela passe par l’amélioration technologique permanente des produits. Et Quentin Deschamps de citer en exemple l’effort porté par Falmec autour de hottes capitonnées et l’utilisation des matériaux plus absorbants. En jeu également, les conditions d’installation qui peuvent avoir un impact en matière d’émissions sonores. Falmec accompagne les poseurs afin de respecterles bonnes pratiques d’installation qui garantissent les performances du produit. Même démarche pour Liebherr auprès des installateurs en matière d’encastrable afin de préconiser des systèmes d’installation garantissant non seulement la durabilité mais également la limitation des vibrations par exemple d’un réfrigérateur propice aux émissions sonores.
"Le meilleur bruit est celui que l’on ne fait pas..."
C’est là tout le paradoxe de marques d’électroménager premium : la performance d’équipement s’accompagne de sources de bruits supplémentaires qu’il faut amortir. « Cela exige des investissements lourds pour analyser ces phénomènes » explique Alexandre Klutchko, responsable marketing de Eberhardt Frères. Dans ses usines en Allemagne, Liebherr s’est ainsi doté d’équipements d’analyses du niveau sonore, avec deux chambres de mesure dites sourdes et réverbérantes. A l’analyse s’ajoutent des recherches autour des comportements de pièces tels les compresseurs et des « silent blocks, éléments en caoutchouc autour des ventilateurs, également générateurs de vibrations… et donc de bruit. Autant d’ingénierie utilisé aussi pour les caves à vin, l’absence de vibration étant essentielle pour la conservation du vin au delà de la problématique de l’acoustique.
De même, plus que la question de l’acoustique, c’est l’ergonomie et la praticité qui ont conduit les fabricants de meubles de cuisine et avec eux, les fabricants de fournitures afférentes, à réduire les nuisances sonores en cuisine. « Le meilleur bruit est celui que l’on ne fait pas quand l’ergonomie est au rendez-vous avec par exemple, avec les tiroirs aménagés » souligne Rodolphe Degret de la société Glass. Alors que l’isolation thermique et phonique des bâtiments est de plus en plus optimisée, la notion de bruit est encore plus perçue. A cet égard, le niveau sonore des équipements comme les meubles de cuisine font aussi partie des points de différence entre les gammes de produits…