Electroménager : une amende de 189 millions d’euros pour entente sur les prix

Electroménager : une amende de 189 millions d’euros pour entente sur les prix

le 11 décembre 2018
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Le 6 décembre 2018, l’Autorité de la Concurrence a révélé les sanctions prises à l’encontre de six marques d’électroménager et déterminées à la suite d’une enquête initiée en 2012 et relative à des faits survenus entre 2006 et 2009. Le montant total des amendes atteint la somme de 189 millions d’euros, avec comme principal grief envers les marques mises en causes le fait de s’être concertées sur des hausses de prix. 2018

Le 6 décembre 2018, l’Autorité de la Concurrence a révélé les sanctions prises à l’encontre de six marques d’électroménager et déterminées à la suite d’une enquête initiée en 2012 et relative à des faits survenus entre 2006 et 2009. Le montant total des amendes atteint la somme de 189 millions d’euros, avec comme principal grief envers les marques mises en causes le fait de s’être concertées sur des hausses de prix.

 

« Aux termes de la décision ci-après, l’Autorité sanctionne les entreprises BSH, Candy Hoover, Eberhardt, Electrolux et Whirlpool pour avoir mis en œuvre des pratiques d’ententes illicites sur le marché de la fabrication et de la commercialisation de produits de gros électroménager, contraires aux articles L. 420-1 du code de commerce et au paragraphe premier de l’article 101 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. »
Ainsi commence le résumé de la Décision n° 18-D-24 du 5 décembre 2018 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des produits électroménagers.

Comme le détaille le communiqué de l’Autorité de la Concurrence, et que Neomag vous livre dans son intégralité ci-dessous, les faits ont couru sur deux périodes distinctes (entre 2006 et 2007 et 2008/2009). L’ensemble des marques mises en causes ont reconnu les faits, ce qui leur a permis notamment d’atténuer le montant des amendes. Le total de ces dernières, 189 millions d’euros, n’est pas un record mais figure dans le top 10 depuis les années 2000. Mais elle aurait pu être plus lourde sachant que La présidente de l’Autorité de la Concurrence, Isabelle de Silva, a précisé dans les échos que « BSH avait bénéficié d’une procédure de clémence, et d’une réduction du montant de son amende compris entre 70 et 80%. »

Cette décision n’est cependant pas une surprise puisque dès juillet, Whirlpool avait annoncé dans ses comptes prévisionnels que le groupe avait tenu compte d’un accord préliminaire estimé, en juillet, entre 95 et 114 millions d’euros. Il faut dire que le rachat d’Indesit a doublé la mise pour le groupe américain, avec 102 millions d’euros au total ( soit 56 millions pour Whirlpool et 46 pour Indesit.)

La totalité des marques ont reconnu les faits. Certaines, comme Eberhardt, ont pris la peine d’adresser un courrier à leurs partenaires et clients afin de démontrer  pourquoi ils avaient accepté l’amende sans faire appel. Ceci afin d’expliquer également que l’entreprise n’avait pas « trahi » ses valeurs. E+F précise dans ce courrier avoir "été mise en cause pour quelques échanges limités d’informations, durant une période très courte de 4 mois. Sur les 189 M€ d'amende transmise aux fabricants incriminés, celle d'Eberhardt Frères a été fixée à 1 M€, montant le plus faible qui pouvait être prononcé pour ce type d'infraction, et qui témoigne de ce que l'Autorité a retenu un rôle très mineur de la société Eberhardt Frères dans les pratiques sanctionnées."
La décision de l’Autorité de la Concurrence n’est pas idéale pour l’image de l’électroménager, dont les marques mises en causes représentaient à l’époque près de 70% du marché du gros électroménager en France. D’autant plus à une période où l’on parle beaucoup des prix et du pouvoir d’achat. Cependant, la crise des gilets jaunes a permis d’ éviter une trop grande exposition médiatique , cette affaire qui n’a pas fait la Une des principaux journaux télévisés.
Mais une seconde enquête, pour entente verticale entre fabricants et distributeurs cette fois, est actuellement menée comme l’a confirmé à plusieurs media la présidente de l’Autorité de la Concurrence, Isabelle de Silva. Ce qui n’est évidemment pas une bonne nouvelle, ni pour l’image ni pour les finances des entreprises concernées…
 

Communiqué de l’Autorité de la Concurrence

« L'Autorité de la concurrence sanctionne six fabricants d'électroménager, parmi les plus importants du secteur (1), à hauteur de 189 M€ pour s'être, notamment, concertés sur des hausses de prix.

C’est à la suite d'indices transmis par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) et d'éléments recueillis lors d'opérations de visites et saisie réalisées par l'Autorité de la concurrence aux sièges des entreprises (notes manuscrites, diaporamas, documents, tableaux), que l'Autorité a décidé de sanctionner BSH, Candy Hoover, Electrolux, Indesit (2), Whirlpool et Eberhardt Frères. Il leur est reproché de s'être concertés à deux reprises, entre 2006 et 2009 (avec une période de suspension entre janvier 2007 et mai 2008), lors de réunions secrètes, sur les hausses des prix de vente conseillés. L’Autorité sanctionne également les fabricants pour s'être mis d'accord entre mai et septembre 2009 sur une modification des conditions commerciales appliquées aux cuisinistes pour les modèles d’exposition.

 

 

Les entreprises en cause n'ont pas contesté les faits et ont bénéficié à ce titre d'une réduction de sanction dans le cadre d'une procédure de transaction. Par ailleurs, BSH, qui a sollicité la procédure de clémence (3) et apporté des éléments complémentaires à l'Autorité, a bénéficié, en tant que demandeur de clémence, d'une réduction d'amende supplémentaire au titre de sa contribution à l’instruction.

Les produits concernés regroupent les principaux produits de gros électroménager, communément appelés « produits blancs » : réfrigérateurs, congélateurs, lave-linge, sèche-linge, lave-vaisselle, tables de cuisson, cuisinières, qu'ils soient encastrables ou en pose libre, commercialisés dans les grandes surfaces spécialisées, les magasins de proximité, les grandes surfaces alimentaires, en vente à distance ou encore par les cuisinistes.

Dans ce secteur, l'usage est que les fabricants communiquent à leurs distributeurs des « prix de vente conseillés » pour la vente au détail. Ces indications correspondent au positionnement prix qu'ils recommandent pour la vente de leurs produits aux consommateurs. Les prix de vente conseillés, qui sont le plus souvent situés à des « seuils psychologiques » sont particulièrement sensibles pour les références les plus vendues, parmi lesquelles celles d'entrée de gamme. Fixés à des montants en dessous de chiffres ronds (comme 499 euros pour un lave-linge par exemple), et dénommés « pics prix » par les acteurs du secteur, ces prix ont une importance particulière, dans la mesure où les quantités vendues peuvent être très importantes. 

Entre septembre 2006 et janvier 2007, puis entre fin mai 2008 et avril 2009, les fabricants se sont réunis à plusieurs reprises pour discuter des hausses à appliquer à ces prix de vente conseillés et arrêter des « règles de prix ».  

À titre d'exemple, en 2008, la règle de hausse de prix décidée consistait notamment à appliquer les évolutions suivantes pour certains produits :

- pour les produits dont le prix de vente conseillé est inférieur à 200 euros : une hausse de 20 euros ; 

- pour les produits dont le prix de vente conseillé se situe entre 200 et 400 euros : une hausse de 30 euros ; 

- pour les produits dont le prix de vente conseillé est supérieur à 400 euros : une hausse de 50 euros.

Ces règles de prix avaient mécaniquement un impact sur les prix d'achat facturés par les fabricants à leurs clients distributeurs, dans la mesure où toute augmentation du prix de vente conseillé entraînait une augmentation du tarif de base, à partir duquel était calculé le prix d'achat par le distributeur en fonction de coefficients prédéterminés par chaque fabricant et par type d'appareil.

Les rencontres se tenaient en marge des réunions officielles du syndicat du secteur, le GIFAM, ou lors de réunions secrètes dans des restaurants parisiens proches du siège du syndicat (tels que le salon de thé Ladurée ou le Corona Impérial).

La concertation sur les hausses de prix se déroulait en trois étapes. Dans un premier temps, les dirigeants des entreprises se réunissaient pour définir les grandes lignes des hausses des prix avant que les responsables marketing ne discutent, ensuite, de leur mise en œuvre. Enfin, les dirigeants se réunissaient à nouveau pour finaliser les modalités de la hausse de prix discutée et garantir ainsi un meilleur suivi. Des échanges téléphoniques complétaient ces discussions.

Outre cette entente, les fabricants, à l'exception d'Electrolux, se sont également concertés entre mai et septembre 2009 sur les conditions commerciales appliquées aux cuisinistes dans le but de réduire le coût des contrats d'exposition de leurs produits chez les cuisinistes. 

Dans la mesure où les prix de gros étaient directement impactés par l'évolution des prix recommandés, la fixation en commun par les fabricants des hausses de prix de vente conseillés a renchéri les prix facturés aux  distributeurs. Ces pratiques ont également été susceptibles d'affecter les prix pratiqués in fine, aux consommateurs. L'entente a concerné une très forte proportion du marché compte tenu des parts de marché des participants à l'entente (70 % en 2012) et des marques concernées parmi les plus connues.

Si le pouvoir de négociation des distributeurs ou la montée en puissance de concurrents asiatiques (Samsung, LG), ont pu atténuer les effets de l'entente, il n'en demeure pas moins que ces pratiques ont pu freiner la tendance globale à la baisse des prix prévalant dans le secteur.

Dans le cadre du calcul des sanctions infligées aux entreprises concernées, l'Autorité a tenu compte de ces éléments ainsi que des demandes de transaction déposées par l'ensemble des protagonistes à l'entente. La procédure de transaction permet en effet aux entreprises qui ne contestent pas les faits de se voir attribuer une réduction substantielle de sanction.

BSH, qui a, par ailleurs, souhaité bénéficier de la procédure de clémence, s'est vu attribuer une réduction de sanction supplémentaire pour sa collaboration active à l'instruction, notamment en ayant apporté des éléments de preuve complémentaires, qui ont permis à l'Autorité de sanctionner des pratiques spécifiques ».

 

1 Ces fabricants représentaient environ 70 % des ventes en France en 2012.


2 Le groupe Indesit a été absorbé par le groupe Whirlpool postérieurement aux pratiques.


3 La procédure de clémence permet aux entreprises qui participent ou ont participé à une entente d'en révéler l'existence à l'Autorité et d'obtenir, sous certaines conditions, le bénéfice d'une exonération totale ou partielle de sanction pécuniaire, en fonction notamment de leur rang d'arrivée à l'Autorité, de la valeur ajoutée des pièces apportées et de leur coopération à l'enquête.

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