Réemploi et reconditionnement : la question du sourcing est un sujet clé sur le marché

Patrick Richard -
Directeur du développement chez ecosystem

Réemploi et reconditionnement : la question du sourcing est un sujet clé sur le marché

le 24 juin 2025
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Pour la première fois, le salon du Vrac et du Réemploi, devenu Reuse Economy Expo, a accueilli les équipements électriques et électroniques (EEE). Ecosytem en était partenaire. Neomag a pu s'entretenir avec Patrick Richard, Directeur du développement au sein de l'éco-organisme. Il nous explique la raison d’être de ce partenariat et où en est la filière du réemploi des EEE. Cet entretien est aussi l’occasion d’évoquer le fonds réemploi, la position particulière des acteurs de l’économie sociale et solidaire (ESS) et le fonds formation récemment déployé.

Réemploi et reconditionnement : la question du sourcing est un sujet clé sur le marché

Neomag. Pourquoi ecosystem est-il partenaire du salon Reuse Economy Expo ?

Patrick Richard. Développer le réemploi fait partie de notre rôle et des obligations liées à notre agrément. D’autre part, il y a des producteurs qui se préoccupent de plus en plus de la seconde vie de leurs équipements. Donc l’idée de ce salon consiste à présenter différentes solutions possibles et différents acteurs (NDLR : une vingtaine de partenaires sélectionnés par ecosystem étaient présents sur le salon). Le but est de couvrir un maximum de catégories – il n’y a pas seulement de l’électroménager mais aussi de l’IT et des batteries – de rassembler tout type d’acteurs et de structures : il y a des acteurs de l’ESS, des start-up, des ETI… L’un propose par exemple une marketplace, quelques-uns effectuent de la collecte ou du reconditionnement d’appareils ménagers, certains s’adressent aux particuliers, d’autres à des professionnels… Nous voulions que cela reflète la richesse de l’écosystème du réemploi.
Nous souhaitons montrer que quels que soient les équipements, il y a toujours une solution. Les coalitions en sont une ; l’objectif est donc de mettre en relation ces acteurs. Pour le faire, nous lançons notamment des appels à projet. Par exemple, sur le salon est exposée une borne de recharge pour véhicule électrique qui est le fruit d’une initiative entre Envie Rhône Alpes et le fabricant de bornes ABB. Le projet vise à reconditionner des bornes de recharge et leur donner une seconde vie. On a donc la possibilité, via le fonds réemploi, de financer des initiatives de réemploi qui n’existaient pas jusqu’à présent sur le marché. Cette année, onze projets ont été financés sur le secteur pro. À travers notre présence, nous montrons que nous sommes un acteur clé de la filière du réemploi et un émulateur de solutions à la fois pour les producteurs, les reconditionneurs, les partenaires, l’ESS… Nous espérons que ce salon devienne un point de rendez-vous européen pour les acteurs du réemploi.

Pourriez-vous nous rappeler les principes clés du fonds réemploi ?

Dans notre cahier des charges d’agrément, nous avons l’obligation de consacrer une partie de nos éco-participations au financement de projets fléchés vers l’ESS. Nous avons un objectif de réemploi correspondant à 2% des équipements qui ont été mis sur le marché l’année précédente.

Pour développer le réemploi, nous apportons donc des soutiens financiers aux acteurs de l’ESS pour leur permettre de mettre en place des unités de reconditionnement, par exemple. Les principaux bénéficiaires sont Emmaüs, Envie, ainsi que d’autres comme Doneo… Mais l’accompagnement s’étend au-delà du soutien financier dans la mesure où nous leur apportons du conseil, nous les accompagnons sur la professionnalisation, sur de nouvelles mises en relation… Quant aux produits que nous récupérons via le gisement un pour un ou le service Je donne mon électroménager et que nous jugeons réemployables, ils sont fléchés vers les acteurs concernés par le fonds réemploi.

“ Le gisement d’électroménager réemployable est de moins en moins important et de moins en moins qualitatif. ”

Le gisement est-il suffisant pour alimenter ces structures de l’ESS en produits à reconditionner ?

Justement, sur le marché du réemploi et du reconditionnement, l’un des sujets clés est le sourcing. Dans le cas de certaines catégories d’appareils, il y a des pénuries. Si on prend l’exemple du smartphone, il y a de la valeur résiduelle et les coûts de reconditionnement demeurent plutôt faibles. En outre, ce type d’appareils « voyage » très bien et il y a beaucoup de pièces détachées compatibles disponibles sur le marché. Dans le cas de l’électroménager, c’est un peu plus compliqué. Cela voyage moins bien et les coûts sont plus importants. Et malheureusement, surtout, le gisement est de moins en moins important et de moins en moins qualitatif. Pourquoi ? Parce que les marchés ne sont pas en hausse. Lorsque le marché du neuf diminue, nous reprenons moins d’appareils en un pour un. De plus, les consommateurs vendent de plus en plus leur électroménager en seconde main. Avant de remettre leur ancien appareil à la filière, ils essaient de le valoriser ou le donnent à des proches. Nous récupérons donc des appareils de plus en plus vieux, parfois dans des états fonctionnels et cosmétiques moins bons. Sans compter que la réparation se développe énormément, ce qui allonge aussi la durée de vie des produits. C’est une très bonne chose mais quand l’appareil nous est remis, il est plus vieux et a parfois subi plusieurs réparations au cours de son cycle de vie. Cela dit, les produits électroménagers reconditionnés issus du flux un pour un représentent moins de 5% – les deux tiers sont du C2C. 
Pour compenser cette perte de gisement, nous menons un énorme travail auprès des distributeurs pour qu’au-delà de leurs obligations de un pour un, ils préservent les équipements qu’ils récupèrent et nous les confient afin que nous puissions à notre tour confier à l’ESS des produits de meilleure qualité.
Nous développons des solutions pour les aider à trier, comme ODAIA, une application démontrée sur le salon qui permet de scanner la plaque du GEM et d’obtenir une estimation de son âge pour l’orienter plutôt vers du recyclage ou plutôt vers du réemploi. Nous les aidons aussi à faire les bons gestes pour préserver les produits destinés au réemploi. Et ces initiatives fonctionnent ; certains distributeurs comme But ou Conforama nous donnent de plus en plus d’équipements parce qu’ils les préservent de plus en plus.
Si on veut développer le réemploi, il faut vraiment aller à la source, c’est-à-dire chez le consommateur : flux un pour un, Je donne mon électroménager...

Certains distributeurs reconditionnant eux aussi, ce sont des appareils qui ne vont pas aux ESS. Cela menace-t-il l’activité de ces structures ?

Dans le domaine du reconditionnement, il y a quasiment autant de business model que de catégories. Et sur un marché compliqué, chacun cherche des leviers de croissance. Les distributeurs travaillent en priorité sur les appareils retournés pendant le délai de rétractation de 14 jours, les retours SAV, les rétractations hors accords fournisseurs… Jusqu’à présent, ils remettaient ce flux à l’ESS, principalement à Envie. La première étape a été de conserver ces produits qui n’ont pas véritablement connu de première vie et ne sont pas vraiment considérés comme des déchets (ils sont hors du périmètre des éco-organismes). Maintenant, ils regardent ce qui peut être économiquement intéressant dans le flux un pour un. La question de fond consistant à se demander si le gisement doit être orienté vers les ESS, si la REP (NDLR : responsabilité élargie du producteur) doit avoir un rôle social, est très structurelle. La loi AGEC n’y répond pas clairement pour l’instant.
Le sourcing étant clé, les acteurs doivent développer de nouvelles possibilités, aller chercher le gisement ailleurs que dans le flux un pour un. C’est la raison pour laquelle nous accompagnons les acteurs de l’ESS pour les aider à aller sur d’autres marchés, sur du matériel professionnel notamment…

“ Si on veut développer le réemploi, il faut vraiment aller à la source, c’est-à-dire chez le consommateur : flux un pour un, Je donne mon électroménager... ”

Concernant le fonds réparation, l’actualité est dense. Une campagne de communication a notamment été lancée quelques jours avant l’ouverture du salon.

À date (NDLR : quelques jours avant le salon qui s’est déroulé fin mai), au total depuis le lancement du dispositif, 41 millions d’euros de bonus ont été reversés aux consommateurs. Cela représente 1 331 000 réparations depuis le début du fonds.
En ce qui concerne le label QualiRépar, le réseau compte 1233 entreprises labellisées, ce qui représente 7605 points de réparation, pour un total de 15 611 techniciens. Les principales catégories réparées demeurent de loin le téléphone portable (plus de 500 000 réparations), puis le lave-linge (environ 150 000 réparations) et le lave-vaisselle (environ 150 000 également).
Pour 2025, l’enjeu clé est de développer encore le réseau de réparateurs pour en avoir un maximum répartis sur tout le territoire. Nous allons donc encore un peu simplifier la labellisation pour les petites structures d’un point de vue administratif et nous réfléchissons à un moyen de réduire encore son coût. Il faut trouver le bon équilibre entre simplification et maintien d’un certain niveau d’exigences. Le second enjeu concerne la communication pour continuer à faire connaître le bonus réparation. La campagne lancée juste avant le salon va nous y aider. Pour 2026, nous envisageons d’adopter une communication interfilières pour essayer de massifier son impact. Enfin, il y a un dernier enjeu : former des techniciens. Le fonds formation a justement été déployé au mois de mars. 

 

“ Pour atteindre nos objectifs de réparation, il faut faire connaître le bonus, que le maillage territorial soit satisfaisant et qu’il y ait des techniciens disponibles pour réparer. C’est véritablement un plan à 360°. ”

En quoi consiste le financement de la formation ?

Nous avons pour objectif de dépenser 5 millions d’euros par an, donc 15 millions d’ici à 2027, pour participer à la formation de techniciens. Cette fois, c’est un fonds qui est fléché vers les réparateurs. Mais bien entendu, il n’est pas question de financer toutes les formations, nous avons des exigences et des critères - par exemple, seules les formations en présentiel sont concernées. Le dispositif, lancé depuis mars, consiste à prendre en charge une partie des formations pour les réparateurs, selon les barèmes, selon les types de formation... Nous apportons une aide financière à la formation initiale et aux qualifications (par exemple pour le froid) pour les réparateurs qui souhaitent faire évoluer leurs compétences. Nous avons choisi l’organisme Opcommerce pour piloter la gestion des financements. C’est lui qui gère l’éligibilité, la recevabilité et les justificatifs. Le but est d’avoir un référentiel de formation qui soit en adéquation avec le marché et les métiers. Sur le site label-qualirepar.fr, il y a un onglet dédié au fonds formation où tout est expliqué ; les réparateurs peuvent y obtenir toutes les informations qu’ils souhaitent (les critères d’éligibilité, comment faire sa demande...). Nous devons absolument former de nouveaux techniciens car pour atteindre nos objectifs de réparation, il faut faire connaître le bonus, que le maillage territorial soit satisfaisant et qu’il y ait des techniciens disponibles pour réparer. C’est véritablement un plan à 360°.

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