Franck Pellé

Président du Directoire Eberhardt

Franck Pellé

le 9 juillet 2020
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Voir que les consommateurs aiment encore avoir le contact ou le conseil d’un vendeur pour des produits à valeur ajoutée, c’est une excellente nouvelle

 

 

 

Neomag : plus d’un mois après le déconfinement (entretien réalisé le 16 juin NDLR) et la réouverture des magasins de biens non alimentaires, comment jugez-vous la reprise de votre activité dans la division grand public Eberhardt ? Est-elle conforme à ce que vous en attendiez ?

Franck Pellé : La reprise est d’autant plus étonnante, positivement j’entends, qu’elle a été très forte dans les magasins. On aurait pu s’attendre à une prolongation des ventes en e-commerce post-confinement, avec notamment la gêne ressentie par les mesures sanitaires en magasin, mais on a constaté un niveau de ventes dans le réseau physique revenu à son niveau d’avant-covid.

 

Une bonne nouvelle pour Eberhardt  dont les marques sont davantage présentes dans le retail physique ?

Les produits plus chers nécessitent davantage d’arguments et ces arguments sont plus difficiles à développer sur un site internet, fût-il le meilleur du monde, qu’en présentiel. Nous vendons évidemment aussi sur Internet, là où nous sommes. Mais voir que les consommateurs aiment encore avoir le contact ou le conseil d’un vendeur pour des produits à valeur ajoutée, c’est une excellente nouvelle.

 

"Dans les usines européeennes de Liebherr,  la gestion de la crise a été exceptionnelle"

 

Quelques mots sur le réseau cuisiniste, où vous êtes aussi très présents ?

Ce réseau repart bien. Une marque comme Falmec, très orientée cuisiniste, se rapprochera de son historique en juin 2020 par rapport à juin 2019, ce qui est donc un très bon signe. Et Asko repart encore mieux, ce qui est un excellent indicateur sur les capacités de reprise des cuisinistes. La confiance est elle aussi repartie très vite. Pendant le confinement, nous avons énormément communiqué par mail pour rester en contact avec nos clients. D’abord pour prendre de leurs nouvelles, et ensuite voir comment on pouvait les aider économiquement.

Nos résultats sont supérieurs à nos prévisions car je pense que quelques concurrents n’ont pas réussi à livrer dès la reprise. 

 

Qu'en a-t-il été de la production au sein des usines de vos trois marques grand Public ?

Dans les usines européeennes de Liebherr,  la gestion de la crise a été exceptionnelle. C'est une entreprise très sociale, où le dialogue est très fort avec les syndicats, ce qui a permis d'établir des mesures barrières en confiance et donc rapidement. Ce qui fait que les usines Liebherr n’ont fermé qu’une semaine en allemagne et en Autriche, et pas du tout en Bulgarie. Nos usines en Allemagne ont même augmenté leur  production pour Liebherr.

Pour Asko, il y a eu un arrêt bref mais la demande s’étant arrêtée elle aussi, l'impact a été moindre. Dès que nos commerciaux ont été de retour sur le terrain,  la demande de nos clients est repartie aussi vite.

Chez Falmec, la production en Italie a été beaucoup plus impactée mais sans  conséquence car la demande s’était effondrée elle aussi.  Aujourd’hui la production est repartie et heureusement aucun cas de covid-19 n'a été enregistré au sein de l'usine.

 

Eberhardt, c'est aussi une division professionnelle qui s'adresse à une clientèle de restaurateurs ou hôteliers, durement touchés par la crise. Quelle est la situation aujourd'hui ?

 

Cette division représente un tiers de notre chiffre d'affaires. Nous ferons un mois de juin 2020 égal à celui de 2019, ce qui est largement au-dessus de nos prévisions. Il y a 3 facteurs qui expliquent ces chiffres. Le premier c’est que des appareils de froid ou de cuisson ne sont pas réutilisables après une période d’inactivité si ils n'ont pas été mis en sécurité. Et les établissements qui ont mis leurs employés au chomage partiel du jour au lendemain, n'ont pas été en mesure de réaliser ces mises en sécurité, et ont donc dû changer leur équipement. Ensuite,  les restaurateurs  qui ont fait de l’ emporté ont acquis du nouveau matériel,  comme des vitrines de présentation. Et enfin, ceux qui ont fait du drive-in une priorité dans leur modèle économique, et décidé de le perpétuer, ont fait des investissements encore plus importants en matériels.

 

"Le changement d'identité nous semblait approprié à un moment où le mot confiance devenait aussi concret, essentiel"

 

Passons maintenant à Eberhardt d'un point de vue global. Il y a quelques mois, Christian Eberhardt a pris sa retraite, vous confiant la présidence du directoire. Comment cette nouvelle gouvernance  a-t-elle traversé la crise ? Avec les membres du directoire et du conseil de surveillance, quels sont les postes clés du nouvel organigramme ?

Il n’y a pas eu de frictions mais beaucoup de confiance. Nous nous sommes tenus constamment informés, ce qui a fait que chaque service savait ce qui se passait chez l’autre. Mais il faut savoir qu'avant  d’être officiellement mis en place en janvier 2020, cette nouvelle gouvernance était testée depuis juillet 2018. Ce qui fait que nous étions préparés.

Le Directoire, composé de trois personnes (Philippe Ancel, Serge Mathis et Franck Pellé NDLR), est là pour prendre les décisions stratégiques et pour rapporter au Conseil de Surveillance. Le conseil de surveillance est là pour préserver les intérets de l’actionnaire (Christian Eberhardt NDLR). Puis vous avez un comité de direction composé de 6 membres, dont ceux présents au directoire. Les 3 autres sont  les  directeurs des divisions Ménager, Thibaut Royer, Pro, Philippe Meyer, et Digital et communication avec David Schillo.  

 

 

Autre changement, celui dunom commercial et de l’identité visuelle. Vous avez déjà évoqué ce que signifiait ce changement. Mais comment vos clients distributeurs l’ont-ils accueilli ?

Nous avions hésité à communiquer sur ce changement, prévu avant le confinement je précise, car nous nous disions que les gens avaient peut-être autre chose à penser, qu’il fallait attendre septembre. Et puis finalement nous venions de vivre une période tellement difficile, qu'annoncer ce changement d’identité et de base line avait du sens. Cela nous semblait approprié à un moment où le mot confiance devenait aussi concret, essentiel. Ce changement était à la fois important pour nos clients mais aussi pour nos équipes.

 

La digitalisation a connu avec le confinement une forte accélération dans sa mise en place. Chez Eberhardt, quelle place a celle-ci ? Et les récents événements vous ont-ils fait changer, ou accélérer, des dispositions dans le digital ?

La « cellule du Digital » a été créée début 2019, avec 6  personnes dirigées par David Schillo, ce qui traduit déjà je pense une forte volonté dans ce domaine. Et ce service est également au comité de direction, ce qui en démontre l’importance que nous lui accordons. Ce qui est également très significatif, c’est d’avoir lié la digitalisation et la communication, le contenant et le contenu.

Concernant son impact sur le confinement, toutes les décisions prises et les investissements l’ont été pré-covid, en "réaction" à tous les mouvements sociaux que le pays a connu. Cette série inédite d'événements qui a paralysé le pays, en partie économiquement, nous a obligé à trouver des solutions pour mieux gérer ces crises et leur impact. Et puis lorsqu' est arrivée la pandémie, dont les conséquences sanitaires avaient des similarités avec les crises sociales,  nous étions préparés..

 

Avec la crise de la covid-19, il y a un fort engouement pour la durabilité, la réparation… Cette tendance devrait profiter normalement à vos marques. Quel est votre avis sur cette tendance ? Est-ce un vœu pieux ou une réalité que vous ressentez ?

Cela a eu un impact sur le consommateur et la crise de la covid-19 nous apprend que l’écologie et l’environnement sont encore plus importants aujourd'hui. Il y a une part de la population extrêmement inquiète pour son avenir, qui achète du premier prix pour essayer de garder une part de son budget par sécurité. Le milieu de gamme quant à lui souffre. Et le premium, lui, constitue une réassurance pour ceux qui sont moins inquiets du lendemain. Ces derniers s’inscrivent dans un changement d état d’esprit auquel la marque apporte une réponse, à condition qu’elle apporte aussi une promesse. La promesse d'avoir  la disponibilité des pièces détachées sur dix voire 15 ans, une véritable économie d’énergie avec les appareils achetés, une garantie qui soit une vraie garantie... Et nous sommes dans cette promesse avec nos marques...

 

"Dans le métier de l’électroménager, l’année 2021 devrait revenir au niveau de 2019"

 

Vous êtes intervenus récemment sur la question de la nouvelle étiquette énergie et de son application ? Où en est-ce ?

Il semblerait que l'on s’oriente vers une application de la nouvelle étiquette énergie en mars 2021, c’est-à-dire dans l’agenda qui était prévu. Il ne faut pas reculer sur une mesure qui s’inscrit dans une véritable démarche écologique mais  il faut tenir compte du fait que la crise a désorganisé tous les stocks, que ce soit chez le fournisseur comme chez le distributeur. Alors  l’étape intermédiaire qui consistait pendant 6 mois à gérer les deux étiquettes devrait voir ses régles s’assouplir. Et c'est une bonne chose.

 

La pandémie n'est pas finie. En interne, avez-vous déjà pensé à un dispositif spécial en cas de seconde vague ? 

Lorsque c’est arrivé nous sommes tous partis d’une page blanche. Et il fallait prendre des mesures rapidement car nos salariés en avaient besoin. Si demain, la pandémie devait revenir, ni l’état ni les entreprises n’auraient les moyens de refaire face à un confinement total. Mais je pense que nous avons tous appris qu’il fallait juste se laver les mains et porter un masque, et le gouvernement semble gérer les clusters. Aussi, il y aura peut-être  une seconde vague mais elle sera mieux gérée car nous avons des cahiers des charge déjà écrits. Elle devrait donc avoir un moins grand impact sur l’économie.

Si il n’y a pas de seconde vague, la question sera de voir comment repartira 2021. Une économie exsangue, un chomage qui explose ou alors un retour aux chiffres de 2019 ? Dans le métier de l’électroménager, l’année 2021 devrait revenir au niveau de 2019. Mais dans les endroits du monde où l’économie  a été placée avant l’humain, la remontée sera plus rude. En Europe, l’humain a été placé avant l’économie ce qui a amorti l’impact économique mais aussi psychologique de la pandémie. 

 

 

 

 

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